SARAH-KATE TEMPLETON, HEALTH EDITOR
Sunday Times 18/05/14

Un dédommagement de 500.000 £ a été accordé au titre de « compensation aux victimes d’actes criminels » pour les graves lésions cérébrales causées in utero par l’alcoolisation de sa mère.

Molly, 16 ans, résidant dans le nord-ouest de l’Angleterre, a été considérée victime d’un crime parce que sa mère avait persisté à boire malgré les mises en garde du personnel sanitaire et de la police sur les risques qu’elle faisait courir à son enfant à naître. Le diagnostic de SAF a été fait quand Molly avait 4 ans.

La nouvelle de cette indemnisation, accordée par le « Criminal Injuries Compensation Authority » [CICA] en septembre dernier, est interprétée comme une tentative de contourner la décision de la Cour d’Appel de bannir de telles indemnisations. Selon les modifications introduites en Novembre 2012, après le dépôt de la demande Molly, cette autorité estime en effet que les fœtus endommagés in utero par la consommation excessive d’alcool par la mère ne peuvent être considérés comme victimes de crimes violents et qu’elles ne peuvent donc prétendre à une indemnisation.

Toutefois, un conseil [d’avocats] conteste cette politique en faisant valoir qu’une petite fille de 6 ans atteinte de SAF a droit à une indemnisation pour les dommages cérébraux causés par la consommation d’alcool de sa mère enceinte. Il croit que la mère est criminelle d’avoir « empoisonné » son futur enfant, car elle a été informée du danger potentiel de ses actions.

En cas de succès, l’affaire pourrait avoir des implications profondes. Les avocats agissant pour le conseil représentent 80 enfants en Grande-Bretagne qui ont subi des dommages physiques et mentaux en raison de la consommation excessive de leurs mères. Ils disent que les indemnités versées à Molly, et à un petit nombre d’autres enfants avant elle, ont en effet créé une jurisprudence.

Neil Sugarman, directeur associé chez les avocats de BPL dans le Grand Manchester, qui agissent dans l’affaire, a déclaré : « Il est très injuste que certains enfants, qui ont autant de mérite que de besoins, aient obtenu une indemnité, et que d’autres dans la même situation ne l’obtiennent pas. Je pense que du point de vue du profane ou d’une victime de ce syndrome, la CICA assume que la consommation d’alcool en excès, avec la conscience de nuire au bébé, puisse tantôt être un crime et tantôt ne l’être pas du tout. »

Traduit par le Dr Alain Fourmaintraux
www.thesundaytimes.co.uk

« Il s’agit d’une lutte entre deux juridictions anglaises. Le principe d’indemniser l’enfant paraît juste, que la mère soit considérée comme criminelle ou non. Il n’est pas fait allusion dans l’article à la dépendance maternelle. Si elle l’est, selon notre conception médicale française, elle ne jouit plus de son libre arbitre et ne peut donc être considérée comme coupable, encore moins comme criminelle. Par contre, si elle n’est pas dépendante, elle peut être considérée comme responsable et donc coupable ». Dr A. Fourmaintraux

On peut aussi critiquer la notion, répétée dans l’article, de consommation « excessive ». Toute consommation d’alcool pendant la grossesse est excessive, n’est-il pas ?

L’obligation pour l’État d’indemniser les victimes fœtales d’alcoolisation maternelle pourrait inciter celui-ci à mener une politique de prévention sérieuse…

pdf boire-pendant-grossesse.pdf